L'imprimerie Zodiac

Septembre 2018



Avant-propos :

- Aucune information ne sera donnée sur la localisation du site.
- Je ne souhaite pas faire d’échange de lieux.
- Ceci n'est pas un site de photographies mais de visites de lieux abandonnés.

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Je ne suis pas tellement branché patrimoine industriel car quasiment toutes les visites se font dans des lieux dégradés, pillés, tagués et bien souvent, vidés. Ainsi, à part contempler l'espace et étudier les rares engins laissés sur place, j'ai vraiment du mal à y trouver de l'intérêt. Mais ici... oh mon Dieu !


En conduisant pour revenir d'une réunion professionnelle je vois cet ensemble de plusieurs bâtiments qui comporte des signes qui ne trompent pas : un gros cadenas sur le portail, une plaque de metal vissée sur la porte d'entrée, quelques stores qui pendouillent et un gros panneau "défense d'entrer". Ça sent bon ! Je note le nom de l'entreprise sur mon téléphone puis entame une petite recherche google après m'être garé sur le bas côté, non sans avoir roulé au préalable par mégarde sur une palette Europe abandonnée, signe que des gens travaillent par ici et n'hésitent pas à se mobiliser en traversant la route.

Comme le nom qui figure sur la façade le laisse entendre, il s'agit d'une imprimerie et j'apprends qu'elle est fermée depuis quelques années déjà. Je décide d'aller jeter un petit coup d’œil, bien trop tenté par cet ensemble qui se présente à moi.

Discrètement, je fais le tour de tous les accès potentiels. Pas évident de passer inaperçu, il y a pas mal de monde qui traîne par ici, sans compter une caméra de surveillance qui pointe directement vers l'ancien PC de sécurité. Après plusieurs tentatives au sol ou dans les airs, me voici à l'intérieur.

L'arrivée dans les bureaux provoque un sentiment troublant. Le lieu est en excellent état, il y fait plutôt bon et on s'attendrait presque à voir débouler du personnel administratif. Sur une table, plusieurs tracts syndicaux sont présents, signe que, forcément, l'arrêt des rotatives ne s'est pas fait dans le plus grand des calmes et a plus été une obligation des patrons qu'une volonté des salariés.

J’entrouvre discrètement une porte qui semble m'amener dans un espace dont j'ai du mal à déterminer la fonction, mais il s'agissait très probablement d'un lieu permettant de recevoir de potentiels clients. Je constate deux choses : il y a l'électricité dans le bâtiment et surtout, mon arrivée dans cette pièce déclenche une alarme presque silencieuse, émettant un tout petit "bip" régulier.

Je prends le temps de réfléchir à la situation. Mon accès n'est pas très logique et n'est pas celui utilisé par une potentielle société de sécurité. La configuration du lieu étant ce qu'elle est, j'ai donc le temps de faire la visite et je peux avoir un échappatoire discret si besoin.

Car mince, ce serait dommage de partir car le lieu a vraiment du charme !



Les lignes sont très épurées et les tonalités claires ou pastelles donnent un aspect très design à l'ensemble.



Plusieurs parties composent ce bâtiment qui était occupé par différentes sociétés ayant chacune une fonction bien précise au sein de cette imprimerie. Une petite centaine de personnes devait travailler ici. Certaines pièces semblent avoir été fouillées, plus dans le cadre d'un déménagement rapide que d'un pillage.



Les locaux des différentes entreprises étant liés entre eux, c'est sans difficultés que l'on peut parcourir le tout. Je reste toutefois vigilant et regarde régulièrement par la fenêtre pour confirmer je suis bien seul. À noter que dans cette partie, la climatisation est allumée et tourne encore. Depuis plus d'une demi décennie !





Un petit passage par l'ancien accueil, où il n'y a pas grand chose à voir et même si ça se n’apparaît pas sur la photo, la porte d'entrée est barricadée en bas par une plaque en métal et fixée par de gros rivets pour prévenir toutes intrusions. Quelques tags ici et là revendiquent le droit de travailler.







Et après une visite rapide des bureaux, je me dis qu'il serait quand même bien de voir les différents entrepôts qui jouxtent le bâtiment principal et qui contiennent encore peut être des choses intéressantes. Une autre alarme discrète se déclenche. Je ne sais pas si c'est lié au fait qu'une caméra semble activée dans cette pièce.



Ma curiosité est partiellement satisfaite lorsque je tombe là dessus :


Bon, pas plus à voir de ce côté là, je continue la visite et m'aventure dans une autre partie du lieu avec quelques ordinateurs allumés et un serveur en activité. C'est assez dingue sachant que l'entreprise à mis la clef sous la porte et qu'elle n'existe plus à ce jour. Si ça se trouve, lors de la mise en liquidation judiciaire, chacun s'est dit que quelqu'un d'autre allait le faire et au final, personne n'est jamais passé. Je me demande qui paie. Probablement un peu vous et un peu moi.


On trouve encore quelques restes de vie professionnelle ici et là. C'est avec un peu d'amertume que je traverse ces différents bureaux désormais silencieux qui comprennent encore un peu de matériel et quelques posters d'un goût douteux dont celui-ci, avec le Naked Cowboy :





Il ne me reste plus qu'un immense bâtiment divisé en deux à faire. Il est sûr que s'il doit y avoir de grosses rotatives, ce sera à l'intérieur. Malheureusement il est impossible de rentrer sans un minimum d'équipement si on ne veut rien casser. Je retourne donc à ma voiture et je constate que j'ai un pneu complètement à plat. Mince. En même temps, il était évident que rouler sur ce reste de palette Europe au milieu de la route n'était pas une bonne idée. N'écoutant que son courage et puisant dans ses ultimes ressources pour activer son mode super guerrier, ma voiture redouble d'énergie et arrive ainsi sans difficulté dans une zone industrielle à la recherche d'un savoir faire ancestral à base de mèches. Je l'aime bien cette caisse. Malgré son âge mûr, elle pète le feu et me rend de fiers services depuis plus de 10 ans. Bon, il me faudra faire trois garagistes avant d'en trouver un avec du temps de libre, mais en 30 minutes et 25€ en moins, me voici avec un pneu comme il faut.

Ainsi, malgré la distance du lieu, j'ai décidé de repasser une deuxième fois dans cette imprimerie avec l'attirail nécessaire. Bruno, un ami de confiance qui m'accompagne de temps en temps, est de la partie. C'est toujours mieux d'être à deux pour faire des cascades !

Bon, ok, ce que nous voyons en premier, est plutôt vide et chacun de nos pas provoquent de l'écho en rythme avec une nouvelle alarme discrète. Ce n'est pas très fascinant mais le lieu est tellement monumental que c'est déjà bien d'avoir réussi à rentrer à l'intérieur, sans compter que c'est toujours amusant de galérer un peu et de faire quelques acrobaties.





Et c'est au détour d'un ultime couloir que nous tombons sur la perle rare : 4 niveaux équipés de rotatives offset de presse. Une dinguerie ! Mais j'imagine que si tout est encore là c'est parce que c'est impossible à déplacer ou à voler. C'est assez difficile à décrire mais je trouve qu'il y a une certaine émotion à voir cela. Déjà, c'est plutôt beau et la complexité de l'ensemble frise l'ouvrage d'art. Et surtout, se dire qu'il y a eu des centaines de personnes qui ont pu travailler ici, apprenant à maîtriser avec amour cet outil sophistiqué qui n'a eu de cesse de se perfectionner depuis Gutenberg, permet de contextualiser toute la souffrance que représente la mise en liquidation judiciaire d'une telle société.
Magnifique par son passé mais triste à en pleurer pour son dénouement.





Sous certains angles on dirait du Hans Ruedi Giger avec des relents de bestiaires biomécanique :



On trouve une petite salle des commandes, dans un état de conservation quasi neuf :



Je vous laisse admirer les photos. Il va être indispensable que je me renseigne sur le pourquoi du comment de chaque objet auprès d'une connaissance qui est dans le milieu afin de pouvoir compléter ce compte rendu :









Voici quelques exemples de machines qui comprennent encore des journaux en cours d'impression :



















Nous terminons ensuite par un petit espace consacré aux salariés avec vraisemblablement de petits bureaux. Pas grand chose à se mettre sous la dent tant nous sommes encore soufflés par la véritable "salle des machines" que nous venons de visiter.

Ce compte rendu sera complété très prochainement, avec le nom et l'utilité de chaque engins, autant que possible !

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