La villa Sumer

Juin 2018



Avant-propos :

- Aucune information ne sera donnée sur la localisation du site.
- Je ne souhaite pas faire d’échange de lieux.
- Ceci n'est pas un site de photographies mais de visites de lieux abandonnés.

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Normalement, cette villa située dans une zone plutôt calme ne présente pas tellement de difficulté relative à son accès. Pas de vis à vis, espace forestier tout autour ou clôture quasi inexistante mais le sort en a décidé autrement. Il semble écrit quelque part que Josh et moi allons devoir galérer pour y pénétrer.  Première tentative le matin même. Nous approchons discrètement et remarquons une voiture garée à l'intérieur, avec une plaque étrangère et un couple en train de traîner dans le jardin. Ce ne sont pas les proprios (plutôt connus) ni même des jardiniers ou des agents immobiliers. Ils n'ont pas non plus l'air d'explorateurs ou de pilleurs. Ils présentent bien et sont en tenue de ville. Probablement des journalistes.

Je ne vais pas trop en dire sur l'histoire de cette villa construite au milieu des années 70 mais il faut savoir qu'elle est au cœur d'une espèce de mafia géopolitique avec du très beau monde qui serait passé entre ses murs et qui, par un savant montage financier, se seraient servis de la villa pour financer des procédures illégales. Elle est inhabitée depuis les années 2000 et est donc de fait à l'abandon depuis presque 20 ans (même si ses propriétaires ont changé régulièrement depuis cette date).

Deuxième tentative, vers midi. Une personne dort devant, moteur allumé. Il a une allure d'ouvrier. La villa a longtemps été gardée mais d'après mes sources, ce n'est plus le cas à présent. Il va nous falloir repasser car pour l'instant les travailleurs qui s'affairent à la villa voisine ont décidé de faire un petit break.

Troisième et ultime essai en fin de journée et cette fois, c'est la bonne. Heureusement que nous avions prévu une tournée dans le coin qui nous a permis de visiter d'autres adresses en attendant. Nous pénétrons à l'intérieur du parc de la villa Sumer le plus facilement du monde.

Son architecture est totalement improbable. On dirait un bâtiment tout droit sorti du désert avec, sur les portes, la boite aux lettres et sur quelques ferronneries, des fresques très curieuses qui semblent s'inspirer des arts premiers Sumériens. Hormis ces quelques folies, on a droit à tout ce qu'il y a de plus classique dans la région, probablement afin de valider le permis de construire.



À l'arrière, tout est grand ouvert, mais également très dégradé. Des tags, des détritus, un barbecue ainsi que des tessons de bouteilles démontrent que le lieu a été utilisé ces dernières années pour que la jeunesse (dorée) locale vienne prendre du bon temps. C'est même assez hallucinant qu'avec l'histoire du lieu et les procédures en cours, tout puisse être si librement accessible. Passons. J'ai aussi fait le choix de vous montrer la villa sous son plus beau jour, dans les pièces les moins ravagées, mais sachez que le spot est totalement déglingué et que les photos ne sont pas représentatives de l'ensemble.

J'ai déjà pu le préciser ici, mais s'il y a un type de visites que je préfère c'est celui des villas d'architectes. Ici, même si le lieu est en fin de vie, essoufflé après des décennies d'absence d'entretien, c'est un réel plaisir tant tout est insolite !
Le salon ne possède aucun angle et semble construit dans une bulle avec quelques touches orientales ça et là. Au sol, on trouve énormément de papiers concernant les anciens propriétaires (pas n'importe qui, en plus) ainsi que beaucoup de déchets divers et variés (bombes de peintures, pots de fleurs, vaisselles etc).



Mais le véritable coup de cœur, d'entrée de jeu, concerne la mezzanine et son petit balcon qui possèdent un charme fou. Il ne reste plus grand chose et tout a été pillé ou saccagé mais je suis complètement fasciné par tout ce que je vois.



Un espace nuit au bout du couloir comprenant une chambre, une salle de bain ainsi qu'un dressing est présent à ce niveau. Une porte massive et avec de petits motifs permet de l'isoler du reste du palier. Malheureusement, tout a été dégradé et très probablement fouillé, au départ, par les forces de l'ordre ou des journalistes afin de trouver des preuves, et par la suite, de petits couillons qui cherchaient probablement des billets oubliés. Les coffres forts ont par exemple tous été démontés.



Seul le dressing est encore dans un état relativement correct.





Je redescends au rez-de-chaussée. La salle de bain de l'entrée est dans un style assez personnel, toujours accompagnée d'une porte en fer monumentale.



Toujours à ce niveau, nous pénétrons dans une autre chambre avec une photo du mari (ou du frère) de la principale résidente. D'ailleurs, m'est avis qu'elle devait peut être dormir dans cette pièce. Dans un petit sac figure un lot de bobines Super 8. Curieux.



Mais le plus beau concerne cette salle de bain, totalement magnifique et plutôt bien conservée.



De l'autre côté du salon on trouve deux cuisines en enfilades avec un escalier pour les domestiques qui amène à un niveau inférieur.



C'est sacrément en bazar mais j'ai quand même conscience de visiter un lieu d'exception car totalement gigantesque, à l'architecture improbable et à l'histoire tristement passionnante. Jamais de ma vie je ne pourrais pénétrer encore dans une habitation de la sorte. Autour de la piscine on trouve une aile comprenant un combo chambre + salle de bain mais qui a été tellement agressé qu'il est inutile de diffuser des photos. L'aile droite est, par contre, plus intéressante.



En m'y rendant, je trouve un livre au sol où une jeune femme est présente avec de petits hommes. Après vérification, il s'agit d'une version arabe de Blanche Neige et les 7 Nains. Signe que des enfants vivaient également ici.



Nous nous dirigeons vers la porte vitrée sur la droite.



Une chambre d'enfants. Comme prévu, tout est en bazar mais les frises Mickey ne trompent pas.


 
Notons au passage la salle de bain très sexy, encore dans un état de conservation relativement correct.



Mais le plus impressionnant n'est pas au rez-de-chaussée. Lorsque l'on descend par un petit escalier au bout de l'aile droite on tombe dans une pièce annexe. Dans le placard il y a pas mal de bobines de films, principalement des comédies musicales ou des films romantiques américains. On pousse une petite porte et nous tombons sur ancien Home Cinema !



J'ai un peu de mal à me représenter le tout mais j'arrive à distinguer un bar (sur la droite), le support pour l'écran qui descend du plafond (vers la fenêtre) mais je n'arrive pas à comprendre à quoi servaient les miroirs derrières le rideau. Ils sont rotatifs et pouvaient visiblement s'éclairer, peut être juste pour faire joli. Au niveau du canapé, une télécommande et un téléphone permettaient de lire ou d'avancer le film et probablement d'appeler les domestiques.

En parlant de domestiques, une petite porte de cette pièce permet de se rendre dans un espèce qui leur était dédié. Ainsi, on trouve, dans l'ancienne entrée un petit bureau d'accueil avec une ancienne machine à écrire, un espace pour garer les vélos, plusieurs toilettes, une cave à vin mais également un espace laverie / repassage très conséquent, encore entièrement équipé avec du matériel de qualité. Très curieusement, personne de malveillant ne semble avoir été ici.





Nous continuons la visite et, après avoir à nouveau visités une chambre et sa salle de bain (totalisant 5 suites + la dépendance des domestiques) nous terminons par un petit espace, où nous trouvons énormément d'objets artistiques. De nombreuses VHS, des cassettes audio d'enregistrement d'un discours pour un anniversaire en plusieurs dizaine d'exemplaires, mais surtout, des tableaux des anciens propriétaires ! Pourquoi est-ce encore ici ? Le propriétaire d'origine est décédé depuis quelques temps mais pas la personne qui vivait là. Curieux qu'elle ait tout laissé. D'autant plus qu'en recherchant sur internet via la signature du peintre, on arrive à retrouver des informations précises sur ces tableaux des années 70 et la raison de ces dessins. Ils ne doivent pas avoir de valeurs particulières même si le peintre n'est pas inconnu au bataillon.



Une visite exceptionnelle dans une demeure tout autant atypique. Assurément un des gros coup de cœur de ce semestre.

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